Initialement publiée sous forme d’albums jeunesse au début des années 2000, Camille la girafe a déjà conquis le cœur de toute une génération d’apprentis lecteurs. 20 ans après ses débuts, Jacques Duquennoy a choisi de lui offrir de (re)vivre ses aventures… sous forme de BD.
Avant d'avoir une vie en BD, Camille a été une star de la littérature jeunesse, peux-tu nous en dire plus ?
Camille a déjà une longue vie. Créée à l'origine pour une série de diapositives pour les écoles en 1986, elle s'est promenée ensuite dans un ouvrage collectif sur le voyage en 1998, un calendrier en 2001, une série de 25 mini-livres en 2004 chez Albin Michel et une collection de 40 mini-albums en Chine où elle est réimprimée régulièrement depuis 2014. Elle est une vraie star là-bas ! Camille, c'est d'abord une série d'histoires courtes abordant tous les thèmes de la vie, du plus grave au plus futile, du plus aventureux au plus intimiste, du rêve à la réalité, comme dans la tête des enfants ! L'idée générale c'est de s'amuser, rêver, rire, avoir peur et apprendre à réfléchir.
On te connait aussi pour les aventures des Fantômes,
comment t'es venue l’idée de créer Camille ?
Ma série des Fantômes a été traduite dans plus de vingt pays et continue d'être publiée depuis 30 ans. Mais avec eux, je ne pouvais pas aborder tous les thèmes de la vie... Pour comprendre d’où vient Camille, il faut effectuer un petit retour en arrière : un jour, j'ai entendu à la radio un fait divers à propos du transport d'une girafe en avion. Intrigué, je me suis amusé à dessiner une girafe pilotant son avion... C’est ainsi que Camille est née ! Ce fut le point de départ de ma première histoire : Camille fait de l'aéroplane. La personnalité de Camille s'est rapidement développée et avec elle la possibilité de raconter les petits et les grands moments de la vie.
Camille a vécu 1001 aventures, comment te viennent-elles en tête ?
Je n'écris jamais mes histoires au préalable. C'est directement sur ma table à dessin que les histoires voient le jour. J'ai une pile de petites feuilles de format carré et je construis des scénarios de 12 dessins. Je jette beaucoup, je déplace, je coupe, je colle, je cherche jusqu'à ce qu'une idée se dessine. Chaque histoire est une petite mécanique. Ce qui m'amuse c'est d'essayer de surprendre. Camille veut tout essayer. Dans chaque histoire, elle va vivre une situation très différente. Piloter un avion, faire des crêpes ou de l'alpinisme, aller sur Mars, repeindre sa maison ou consoler son bébé et même devenir... libraire !
Pourquoi avoir choisi d'adapter ses aventures en BD ?
J'ai toujours eu l'envie de faire de la bande dessinée. À mes débuts, quand je présentais mes dessins aux éditeurs BD on me disait qu'ils faisaient trop "jeunesse" et quand je les présentais aux éditeurs jeunesse on me disait qu'ils faisaient trop "BD" ! Ça a duré longtemps comme ça jusqu'à ce qu'un éditeur de chez Albin Michel flashe sur mes Fantômes. Ça a marché tout de suite et j'y suis resté ! Mais en 2014, les Éditions Albin Michel ont décidé de ne plus continuer à publier Camille. Aucun éditeur jeunesse n’a voulu reprendre la série, sauf en Chine, c'était à n'y rien comprendre ! Je me suis ensuite lancé dans la bande dessinée avec deux longues histoires : Snowman, publié aux éditions de la Gouttière, et Petit Tom dans la collection Mini BD Kids chez Bayard. Après ces deux expériences, j'étais prêt à lancer Camille dans l'aventure BD. J'ai envoyé mon projet à la Boîte à Bulle, la réponse a été immédiate ! Il y a un vrai esprit d'équipe, Camille est entre de bonnes mains !
Les aventures de Camille s’adresse à de très jeunes lecteurs. Comment appréhendes-tu le format BD pour un tel public ?
Mes histoires s'adressent essentiellement aux enfants dans l'apprentissage de la lecture. Je constate qu’il y a encore une réticence à donner une BD entre les mains des plus jeunes lecteurs au motif que c'est trop compliqué et que l'enfant s'y perd en voyant plusieurs images dans la page. Pourtant, quand j’étais instituteur en grande section de maternelle, je demandais à mes élèves de dessiner dans une case un personnage avec un décor ou un accessoire. Je leur demandais ensuite qui était ce personnage, ce qu'il allait faire et de le dessiner dans une autre case... et ainsi de suite. Ils arrivaient à dessiner une petite histoire. Je me dis donc que quand on sait faire une BD, on sait lire une BD ! J'ai fait un long travail d'adaptation, surtout au niveau du découpage pour que les plus jeunes puissent se repérer au niveau du sens de lecture. Trois ou quatre cases par page, horizontales, verticales ou en gaufrier. J'ai ajouté des séquences, j'en ai supprimé d'autres. Il faut être efficace : pas de dessins inutiles, chaque détail doit faire sens. J’ai privilégié la lisibilité et une ambiance colorée différente pour chaque histoire.
À l'heure actuelle, il y a quatre tomes de prévus. Envisages-tu de nouvelles aventures pour la suite ? Pourquoi pas une histoire au long court ?
Je vais d'abord adapter les 40 histoires publiées en Chine dans ces quatre albums. Il y a du boulot ! Il y a aussi quelques histoires inédites. Je verrai bien une fois tout cela terminé... En ce qui concerne une histoire au long court, Camille ne fonctionne pas bien en long récit. Elle est plus à l'aise dans les histoires courtes. En longues histoires, j'ai déjà réalisé Snowman et Petit Tom. J'ai un autre projet en cours, Le Bois aux 100 Loups, découpé en plein de petits chapitres... À suivre !